Durant ces dernières décennies, la croissance très rapide de la population iranienne était liée, essentiellement, au recul de la mortalité et au maintien de la fécondité à un niveau élevé. Cette situation démographique, caractéristique des pays en voie de développement, se traduit en particulier par la grande jeunesse de la population et, notamment, par un nombre important d'enfants en bas âge (0-4 ans). En 1991, 83% des Iraniens avaient moins de 40 ans, l'âge médian étant de 17,6 ans. Cette situation a pour conséquence un fort rapport de dépendance (88 inactifs pour 100 adultes). Avec la baisse de la fécondité depuis 1986, les nouvelles générations sont moins nombreuses, alors que les jeunes adultes sont en passe de prendre une place de premier Plan : les générations de 15-65 ans sont passées de 51,5 à 56,1% entre 1986 et 1996, tandis que la part des 0-14 ans diminuait, de 45,5 à 39,5% de la population totale.
Cette pyramide des âges, assez classique dans un pays en développement, est loin d'être la même sur tout le territoire, en raison de l'effet conjugué du niveau de croissance naturelle et de l'afflux des migrants adultes. La répartition géographique de la population en âge d'activité montre un fort regroupement au Centre-Nord du pays, autour de Téhéran, et près des grandes villes. Cette distinction entre un Iran central, où travaille la population adulte - sinon âgée -, et l'Iran des périphéries, plus jeune, mais aussi moins développé, correspond à l'une des structures spatiales les plus fortes, que l'on retrouve notamment pour la taille des familles.
Le nombre moyen de personnes par famille, environ 5, a augmenté depuis 1956, puisque la proportion de jeunes s'est accrue et que la mortalité infantile a régressé, les écarts entre villes et zones rurales ont par ailleurs tendance à s'accroître, en passant d'une quasi-égalité en 1956 à 0,6 personne de plus dans les familles rurales en 1991. Au total, les inégalités spatiales dans la taille des familles se révèlent comme un bon indicateur de synthèse de la diversité des situations démographiques locales.
Avec une moyenne de 6,2 enfants par femme mariée en 1986, la fécondité légitime était parmi les plus élevées du monde, mais depuis cette date la chute de la fécondité a été extrêmement rapide (estimée à 3,5 en 1993), comme dans plusieurs pays proches (Syrie, Asie centrale). Les taux de fécondité sont très fortement corrélées avec le niveau d'éducation des femmes, c'est-à-dire avec l'ancienneté et le niveau de développement. La fécondité est inférieure à la moyenne nationale dans les départements du nord et du Centre (provinces caspiennes, Nord du plateau central), qui ont bénéficié depuis longtemps des priorités des gouvernements successifs dans les domaines socio-économiques, ce qui a largement contribué au changement des mentalités. À partir de ce bloc central, la fécondité augmente vers les périphéries du pays. La faible fécondité déclarée au Baloutchistan semble par contre tout à fait erronée. Cette faible fiabilité des données (il est probable que les enfants morts en bas âge n'ont pas été comptés) traduit en fait un sous-développement bien plus accusé que dans le reste du pays.
L'espérance de vie à la naissance est passée de 55,8 ans en 1976 à 62,8 ans en 1996. Le quotient de mortalité des enfants à deux ans (moyenne nationale 93) montre les inégalités régionales entre la faible mortalité des enfants dans les provinces caspiennes, sur le plateau et dans les régions urbanisées du sud du pays, alors que les valeurs les plus fortes correspondent clairement aux régions fortement rurales et pauvres d'Azerbaïdjan et du Kurdistan à l'ouest, et du Khorâsân à l'est.
Les contradictions apparentes entre la distribution spatiale de la fécondité et celle de la mortalité traduisent le fait que l'Iran traverse actuellement une étape de transition de son évolution démographique : le niveau globalement très élevé de la fécondité correspond au premier stade de la transition démographique (fléchissement de la mortalité sans baisse correspondante de la fécondité) ; or à ce stade, l'évolution de la mortalité varie sensiblement d'un département à l'autre. Alors que dans les régions centrales la transition est radicalement engagée (faible mortalité et baisse déjà significative de la fécondité), la plupart des régions sont dans une situation relativement confuse, caractéristique des premiers stades de la transition démographique.
Cette situation est également confirmée par les cartes de l'âge au premier mariage des femmes, ou des femmes mariées avant 15 ans : de façon globale, elles confirment (Lorestân, Fars, Khorâsân) ou corrigent (Baloutchistan) celle de la fécondité, et mettent en évidence, à l'échelle locale, des réalités culturelles profondément ancrées. L'âge moyen des femmes au premier mariage, qui avait augmenté faiblement de 1976 à 1986, est passé de 20,1 ans en 1986 à 22 ans en 1996, ce qui confirme l'évolution des mentalités et des comportements et va de pair avec la généralisation rapide de l'usage de la contraception.
L'abolition de la Loi sur la famille de 1967 par le gouvernement islamique n'a pas durablement affecté la politique de maîtrise de la croissance démographique. En 1988, le gouvernement a relancé une campagne très active de régulation des naissances touchant l'ensemble du pays, même les zones rurales. La question démographique constitue un enjeu culturel et économique particulièrement controversé en Iran, car l'excédent annuel de la population - 1,2 million de personnes au début des années 1990, mais seulement 0,5 million en 1996 - absorbe de lourds investissements de base en écoles, santé ou logements. Les autorités ont ainsi eu tendance à modifier les résultats des recensements : en 1976 à la baisse, pour montrer que l'Iran, en voie d'industrialisation rapide, maîtrisait sa croissance démographique, et en 1986 à la hausse, comme c'est souvent dans le cas dans un pays en guerre. Il faut rappeler, à cet égard, que la guerre Irak-Iran a profondément marqué les mentalités et les migrations, mais a eu un impact assez faible sur l'évolution quantitative de la population. On estime généralement entre 350 000 et 450 000 le nombre de morts pendant les huit années de conflit.