L’Espace géographique 3/77

EG 3/77

Version avec les résumés


Débat

Paul Claval. Le Marxisme et l’espace

Les interprétations marxistes des faits de répartition spatiale sont à la mode: cela paraît étonnant quand on constate combien peu la géographie a tiré jusqu’ici de l’œuvre de Marx. Celle-ci fait cependant preuve d’une conscience aiguë de ce que la division du travail et l’accumulation du capital provoquent comme répartition des hommes et des activités; elle souligne l’importance de l’opposition villes-campagnes, suggère l’exploration du couple centre-périphérie; elle donne des indications sur le jeu des faits de conscience de classe dans l’espace. Les références à l’espace, fréquentes au début de l’œuvre, se font de plus en plus rares, et le livre I du Capital n’en contient plus: c’est que l’analyse de la genèse de la forme monnaie ne peut se faire, sous la forme abstraite que lui a donnée Marx, qu’en faisant taire les considérations spatiales.

La pensée marxiste contemporaine essaie de réintroduire l’espace dans un système qui l’avait éliminé: elle le fait en tirant de la réflexion de Marx les éléments d’une théorie positive des faits de répartition et de structure; elle insiste sur l’analyse des praxis; elle développe l’aspect critique de la démarche marxiste. Ces trois orientations débouchent sur des résultats intéressants, mais ils continuent à s’inscrire dans un cadre peu propice à la réflexion géographique.

mots clés: ÉPISTÉMOLOGIE, IDÉOLOGIE, MARXISME, NOTION D’ESPACE, PRATIQUE DE LA GÉOGRAPHIE, THÉORIE


Collectif de chercheurs de Bordeaux. À propos de l’article de P. Claval «Le Marxisme et l’espace»

À propos de l’article de P. Claval «Le marxisme et l’espace»: on doit réfuter ici les positions de P. Claval. On montre d’abord qu’il confond des concepts bien distincts chez Marx: valeur et forme de la valeur; travail utile et travail abstrait; forces de production du travail et du capital, etc. Espace et temps sont présents dans toute l’œuvre de Marx, notamment dans les analyses de la division du travail, de la division villes-campagnes, du rôle des transports dans la formation des prix, des rentes de localisation, des stratégies de localisation dans la lutte contre la baisse tendancielle des taux de profit, ainsi que dans des travaux marxistes récents sur la rente foncière urbaine par exemple. La lutte contre les inégalités sociales et spatiales, les contraintes subies par les géographies marxistes, contribuent à montrer l’importance de l’approche marxiste.

mots clés: ÉPISTÉMOLOGIE, IDÉOLOGIE, MARXISME, NOTION D’ESPACE, PRATIQUE DE LA GÉOGRAPHIE, THÉORIE


Michel Chesnais. Autoroutes et développement régional


Michel Bruneau, Alain Durand-Lasserve, Marie Molinie. La Thaïlande, analyse d’un espace national (1 tabl. h.t., 1 fig.)

Cet article propose une étude de l’espace national thaïlandais, en relation avec l’inégale diffusion, dans le temps et dans l’espace, du mode de production capitaliste. Après une étude de l’évolution de la formation économique et sociale thaïlandaise, les auteurs proposent une division de l’espace national différente de la division traditionnelle qui se réfère pour l’essentiel aux «régions naturelles». Diverses zones sont identifiées sur la base d’une étude portant sur les origines de la diffusion du mode de production capitaliste et sur l’évolution des rapports de production et d’échange, compte tenu des conditions naturelles et techniques de la production. L’utilisation des concepts et de la méthode marxistes permet une approche globale et pluridisciplinaire. L’accent est mis sur l’expression spatiale des phénomènes socio-économiques, sur les contradictions existant dans chacune des zones définies et sur leur dynamisme. La question de la généralisation d’une telle méthode à l’étude d’espaces à différentes échelles est évoquée.

mots clés: ANALYSE MARXISTE, MODE DE PRODUCTION ASIATIQUE, ORGANISATION DE L’ESPACE, THAÏLANDE


Une expérience de recherche

Jean-Pierre Deffontaines, Paul-Louis Osty. Des systèmes de production agricole aux systèmes agraires (6 fig.)

Itinéraire de recherche suivi par une équipe d’agronomes désireux de connaître les conditions et les conséquences de l’adoption, par les agriculteurs, des innovations techniques. La démarche consiste à analyser in situ le fonctionnement des exploitations au moyen de l’étude de processus et mécanismes intervenant dans la production. Chacune des étapes inclut le système analysé dans la phase précédente. De la sorte, le champ des variables s’étend et l’organisation spatiale des phénomènes s’élabore successivement au niveau de la parcelle, de l’atelier de production, de l’exploitation, du territoire d’un ensemble d’exploitations.

mots clés: ANALYSE DE SYSTÈME, ÉCONOMIE AGRICOLE, INNOVATION, TECHNIQUES DE RECHERCHE


Approches interdisciplinaires

Christian Taillard. Le colloque international sur la situation actuelle de l’anthropologie en France


Christian Taillard. Le débat sur l’anthropologie française


Jacques Barrau. Histoire naturelle et anthropologie

Depuis quelques années, la recherche en sciences humaines manifeste un intérêt croissant pour les sciences naturelles, surtout pour l’étude des interrelations sociétés humaines - environnement naturel. L’écologie bénéficie ainsi d’une vogue certaine, là comme ailleurs. Pour autant, la pratique de l’interdisciplinarité qui devrait entraîner une telle orientation se heurte à de nombreuses difficultés. Les vieilles oppositions homme-nature et culture-nature expliquent sans doute ces difficultés. Certes, le progrès des sciences et des techniques pourrait se traduire par une remise en cause de la validité des divisions entre disciplines scientifiques, entre Sciences de la Nature et Sciences de l’Homme. En attendant, ces dernières pourraient se retrouver dans la démarche de la vieille «histoire naturelle» pour étudier les rapports entre les hommes et leur environnement naturel.

mots clés: ÉCOLOGIE, ÉPISTÉMOLOGIE, RAPPORTS SOCIÉTÉ-NATURE, SCIENCES NATURELLES


Olivier Dollfus. Anthropologie et sciences naturelles

On assiste à un renouveau dans la problématique des rapports «sociétés-espaces», qui s’explique par les politiques d’aménagement du territoire, s’aide des apports de l’analyse de système et utilise des techniques nouvelles pour le traitement de l’information. Mais les transferts de concepts d’un bloc scientifique à un autre conduisent le plus souvent à des échecs. En fait, deux démarches complémentaires, mais irréductibles l’une à l’autre, sont possibles: la démarche d’écologie naturelle, qui prend en compte l’action humaine, l’anthropisme, comme un des éléments du système; la démarche des sciences sociales, qui prend en compte l’espace comme l’un des compartiments des «infrastructures», jouant dans l’élaboration des rapports sociaux de production. La sélection des données de base est, elle-même, fonction de la démarche.

mots clés: ÉPISTÉMOLOGIE, HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE, RAPPORTS SOCIÉTÉ-NATURE, SCIENCES NATURELLES


Lectures


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dernière mise à jour: 11 février 2019